28/11/2010
Le prix de la liberté
Vu hier soir le beau film documentaire de Marie Dumora "Je voudrais aimer personne".
Une jeune fille de 16 ans, déjà maman d'un bébé d'un an, se débat entre ses charges de mère, ses conflits avec sa propre mère, ses incertitudes amoureuses et ses galères de boulot.
Ayant revu récemment "Avec ou sans toi" de la même réalisatrice filmant la même petite fille 6 ans plus tôt, je me suis demandé ce que le mot "liberté" pouvait représenter pour cette jeune femme qui passe depuis 14 ans de Maison d'enfants à caractère social en Foyers d'Action éducative!
Rentrant à la Maison maternelle après un we plutôt difficile dans sa famille, on l'entend dire à son fils:"Tu vois N., on rentre en prison". Et pourtant les séquences filmées à l'intérieur de "l'Ermitage" montrent un travailleur social très bienveillant, et des conditions de vie plutôt "cool"!
Quelles idées se font ces jeunes de la LIBERTE, alors que les contraintes qu'ils ont subies émanent toutes d'instances considérées comme illégitimes car extérieures à leur famille d'origine?
La disqualification de fait de cette famille que constitue le placement, rend-il possible l'émancipation de l'enfant ou du jeune adulte par rapport à cette famille déclarée pathogène ?
Ces deux films mais surtout "Je voudrais aimer personne" qui entre de façon impressionnante dans l'intimité de cette jeune fille, montrent combien la quête éperdue de l'amour du père et de la mère ne lui permet pas de s'ouvrir à d'autres préoccupations, c'est-à-dire la condamne à la dépendance des adultes qui la prennent en charge. Est-elle même capable d'élever son fils ? Elle se le demande !
Ayant vécu la disqualification de sa famille - qui d'ailleurs a tout fait pour ça - elle ne peut se révolter contre cette situation "anormale" qu'en dénigrant les structures d'aide dont elle sait avoir besoin, c'est-à-dire en s'enfermant encore plus en elle-même! Pas étonnant que les expériences d'insertion professionnelle fassent long feu!
Quand le besoin légitime de se libérer des souffrances provoquées par l'incompréhension de l'entourage prend la forme d'une révolte qui se retourne contre soi, a-t-on accès à autre chose qu'au désespoir ?
"Quand ma mère me dit que je suis une pute et que je veux deux queues, une à Mulhouse, une à Colmar, je crie, je pars et je pleure!"
à+
17:53 Publié dans Eclats de verre | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : adolescence